Pouvoir de négociation de l’agent commercial : la Cour d’appel de Paris se rallie à la conception extensive de la CJUE

Suite à la conception extensive du pouvoir de négociation de l’agent commercial retenue par la Cour de justice de l’union européenne aux termes de son arrêt Trendsetteuse du 4 juin 2020, la Cour d’appel de Paris a logiquement fait sienne cette conception par arrêt du 1er octobre 2020.

L’arrêt du 1er octobre 2020 de la Cour d’appel de Paris et sa nouvelle conception du pouvoir de négociation de l’agent commercial

Aux termes de cet arrêt, la Cour d’appel de Paris rompt donc avec sa position passée calée sur la jurisprudence de la Cour de cassation antérieure à l’arrêt Trendsetteuse de la CJUE.

En effet, de façon très claire, la Cour juge que “le pouvoir de négocier de l’agent commercial ne saurait se limiter à celui de baisser les tarifs et de modifier les conditions générales de vente du mandant, puisque … la négociation dont est chargé l’agent commercial s’entend de l’ensemble des démarches, discussions et rencontres organisées par lui en vue de trouver des prospects et de les inciter à conclure un contrat avecle mandant, étant rappelé que l’essence de sa mission est de rechercher et procurer à ce dernier des nouveaux clients et de les fidéliser.”

Or, en l’espèce, si le commercial “ne disposait pas du pouvoir de faire varier de façon totalement autonome et indépendante les tarifs ou les conditions de vente du mandant, cependant, comme l’ont relevé pertinemment les juges du tribunal de commerce, cela ne peut suffire à écarter le statut d’agent commercial, le mandant pouvant fixer un cadre de négociation concernant les prix, et l’agent garder le pouvoir de négociation. (…) En l’espèce, le fait que le mandataire assurait la conduite de réunions portant sur la détermination des prix avec les clients et la proposition de vente de prestations et de produits dans le cadre du mandat permet de caractériser le statut d’agent commercial de ce dernier, même si l’accord sur les prix et prestations nécessitait l’accord préalable du mandant.

En définitive, par cette décision, la Cour d’appel de Paris se range à la conception extensive du pouvoir de négociation retenue par la Cour de justice de l’Union européenne, ce qui est logique et normal du fait de la primauté du droit communautaire sur les droits nationaux.

La Cour de cassation en a d’ailleurs fait de même depuis. Heureusement !

Conséquence d’une telle conception du pouvoir de négociation

Une telle jurisprudence permet en définitive à l’agent commercial de bénéficier du statut protecteur énoncé aux articles L 134-1 et suivants du Code de commerce, articles qui, rappelons le, sont pour bon nombre d’entre eux d’ordre public.

Cette jurisprudence évitera désormais une bonne part des débats antérieurs pour savoir si un mandataire pouvait effectivement prétendre au statut protecteur de l’agent commercial selon qu’il avait ou non la possibilité de modifier les prix des produits de son mandant.

Le droit à indemnité de fin de contrat de l’agent commercial, le droit à commissions de l’agent commercial sur l’ensemble des affaires de son secteur en l’absence de clause contraire, le droit de suite de l’agent commercial, etc. n’en seront que renforcés.