Prestataire au service de mandants, l’agent commercial indépendant est un intermédiaire entre des fournisseurs ou des producteurs et des clients. Le droit européen de l’agent commercial, avec la Directive 86/653/CEE, a permis d’établir un cadre juridique propre à cette profession incontournable du commerce national et international. En effet, avant la Directive de 1986, certains États membres de l’Union européenne ne reconnaissaient pas légalement le statut d’agent commercial. Une situation pour le moins délicate alors que les échanges internationaux sont de plus en plus nombreux.
Le cadre juridique du droit européen de l’agent commercial
Adoptée en 1986, la Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial, aussi appelée Directive relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants, a posé les bases pour un cadre juridique harmonisé des droits et obligations des agents au sein de l’Union européenne, en ayant également pour objectif de clarifier les relations contractuelles entre agent commercial et mandant. Cette Directive est ainsi la colonne vertébrale du droit européen de l’agent commercial au sein de l’Union européenne qui a ensuite été décliné au niveau de chaque Etat membre.
Contrat d’agent commercial en droit européen : comment ça se passait avant 1986 ?
Lorsque la Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial n’existait pas, selon leur pays de résidence, les agents commerciaux pouvaient rencontrer des incertitudes et difficultés lorsqu’ils souhaitaient prospecter à l’étranger et/ou travailler pour des mandants situés à l’étranger.
Avant l’adoption de la Directive :
- L’activité d’agent commercial ne bénéficiait d’aucune harmonisation législative au niveau européen, ce qui pouvait rendre compliquée (au bas mot !) un projet de collaboration avec des mandats situés dans un autre Etat, en particulier.
- Il n’existait pas réellement de protection de l’agent commercial dans certains pays puisque celui-ci n’avait pas de véritable statut juridique à l’échelle de l’Europe.
- L’agent commercial n’était pas toujours rémunéré selon des normes claires, ce qui engendrait des risques non négligeables de non-paiement des commissions ou des résiliations abusives de contrats.
- Le contrat de mandat n’était pas toujours équitable, avec parfois des clauses unilatérales et abusives qui plaçaient l’agent commercial en position de faiblesse.
Les principes clés de la Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial
La Directive européenne de 1986 sur les agents commerciaux définit les grandes lignes du droit européen de l’agent commercial :
- La Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial définit l’agent commercial comme celui qui, en tant qu’intermédiaire indépendant, est chargé de façon permanente, soit de négocier la vente ou l’achat de marchandises pour une autre personne, ci-après dénommée «commettant», soit de négocier et de conclure ces opérations au nom et pour le compte du commettant. L’agent commercial peut être une personne physique (commercial indépendant, travailleur indépendant, auto-entrepreneur) ou une personne morale. L’agent commercial n’est donc pas un salarié (notamment, pas un VRP en droit français), mais bel et bien un intermédiaire indépendant.
- Elle énonce les droits et les obligations des agents commerciaux et des mandants, spécifiant les devoirs de chacune des parties dans la relation d’affaires.
- Elle établit des règles sur la rémunération de l’agent commercial (niveau de rémunération à défaut d’accord, droit à commission, délai de paiement de la commission, droit de suite, etc.).
- Elle intègre aussi des règles protectrices des agents commerciaux en cas de résiliation de contrat, notamment la garantie d’une indemnité compensatrice équitable en cas de rupture du contrat, donc le droit à une indemnité de fin de contrat.
- Elle fixe un délai de préavis minimum pour la rupture injustifiée d’un contrat à durée indéterminée, des délais plus longs pouvant être retenus par les Etats membres : 1 mois pour la première année, 2 mois la deuxième année, 3 mois dès la troisième année et pour les suivantes.
- Elle encadre la possibilité de prévoir une obligation de non-concurrence post-contractuelle à la charge de l’agent commercial.
- Enfin, la Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial indique les points sur lesquels les Etats membres peuvent choisir entre plusieurs options pour transposer la directive dans leur droit national (système d’indemnisation de l’agent commercial, durée du préavis, etc.).
Statut européen de l’agent commercial : les particularismes nationaux
Suite à l’adoption de la Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial, les États membres ont eu l’obligation de transposer ses dispositions dans leur propre législation d’ici le 1er janvier 1990. Sa transposition a toutefois pu connaître des variantes d’un pays à un autre, soit du fait de dispositions transitoires, soit du fait d’options possibles laissées aux États membres, soit encore du fait de spécificités nationales antérieures à la Directive ayant été maintenues après (sous réserve de leur conformité à la Directive). Ces particularismes ont un impact direct sur le droit européen de l’agent commercial tel qu’il existe aujourd’hui :
- Dispositions transitoires : des États membres ont pu maintenir certaines règles spécifiques à leur territoire pour une période déterminée, avant de s’aligner sur les normes établies par la Directive. La durée du contrat ou les indemnités de résiliation peuvent ainsi être concernées.
- Options : comme indiqué ci-dessus, sur certains aspects, les États membres ont bénéficié d’une marge de manœuvre pour mettre en place certaines dispositions de la Directive. Des règles nationales spécifiques peuvent donc être choisies dans le cadre d’une de ces options.
- Spécificités nationales : des réglementations spécifiques préexistantes à la Directive ont pu être maintenues par certains États membres, telles que des conditions de résiliation ou les modalités de fixation des commissions, par exemple.
Il convient de relever en outre que la compréhension nationale de la Directive 86/653/CEE sur l’agent commercial, donc par les juridictions nationales, peut aussi entraîner des différences sur « le » droit européen de l’agent commercial. En effet, les décisions de justice des différents Etats membres quant à la portée des dispositions de la Directive peuvent donner lieu à une interprétation nationale spécifique, variant d’un État membre à un autre, jusqu’à ce que la Cour de Justice de l’Union Européenne soit saisie.
CJUE et jurisprudence sur l’agent commercial
La CJUE joue ainsi un rôle de premier ordre dans l’interprétation et l’application du droit européen de l’agent commercial. En effet, elle a pour mission de garantir une interprétation uniforme et une application cohérente du droit de l’Union européenne dans tous les États membres.
Elle intervient donc :
- En cas de questions ou de litiges quant à l’interprétation de la Directive : en effet, les tribunaux nationaux peuvent alors soumettre une question préjudicielle à la CJUE afin d’obtenir un éclaircissement sur le sens d’une disposition, sa portée, etc. L’interprétation fournie par la CJUE s’applique alors à tous les États membres.
- Pour vérifier la conformité du droit européen des droits nationaux : il est possible de saisir la CJUE pour qu’elle étudie si un État membre a bien transposé les dispositions de la Directive dans sa législation nationale. Si cela n’est pas le cas, elle enjoint le pays concerné de prendre les mesures correctives nécessaires pour se mettre en conformité avec le droit européen de l’agent commercial.
À plusieurs reprises depuis l’adoption de la Directive 86/653/CEE, les décisions de la CJUE ont permis de préciser le droit européen de l’agent commercial. En voici quelques exemples représentatifs :
- Affaire C-104/95 – KONTOGEORGAS :
LA CJUE a conclu que l’agent devait être commissionné sur toutes les ventes de son secteur, même en l’absence d’exclusivité, dès lors qu’aucune clause contraire n’existait au contrat. L’arrêt de la Cour a donc permis de clarifier les dispositions concernant l’étendue du droit à commission de l’agent commercial. - Affaire C-215/97 – Barbara BELLONE / Affaire C-58/98 – Joseph CORSTEN :
Dans ces deux affaires, la Cour a établi qu’une réglementation nationale ne pouvait subordonner le bénéfice du statut d’agent commercial à une mesure de police administrative nationale. L’octroi de ce statut ne doit donc pas être subordonné au respect de mesures administratives. - Affaire C-828/18 – TRENDSETTEUSE :
A l’occasion de cette affaire, la Cour a précisé le sens du terme “négocier” en concluant “une personne ne doit pas nécessairement disposer de la faculté de modifier les prix des marchandises dont elle assure la vente pour le compte du commettant pour être qualifiée d’agent commercial”. Cette décision de la CJUE infirme par là même la jurisprudence de la Cour de cassation française en la matière.
Le contrat d’agent commercial en droit européen : un document essentiel pour se protéger
Le droit européen de l’agent commercial, tel que résultant de la Directive de 1986, a donc permis d’harmoniser les droits et les obligations de l’agent commercial en Europe afin de mieux le protéger tout en laissant une certaine liberté aux Etats membres.
Toutefois, de ce fait, ce droit européen de l’agent commercial est à la fois un et multiple, les dispositions nationales continuant de jouer un rôle important.
Par ailleurs, se pose la question des règles pour définir la loi (nationale) applicable au contrat ainsi que les juridictions compétentes en cas de litige relativement à un contrat d’agent commercial international, c’est-à-dire impliquant un mandant dans un Etat et un agent commercial dans un autre Etat membre.
Or, celles-ci ne sont pas arrêtées dans la Directive de 1986 mais relèvent de règlements européens.
Fort de sa pratique du droit de l’agent commercial tant en France qu’au niveau européen depuis plus de vingt ans, FOUSSAT AVOCATS se tient donc à votre disposition pour vous conseiller et vous accompagner relativement à toute question se rapportant à votre contrat d’agent commercial avec un mandant étranger.